Mouches

L’ophtalmo qui m’avait fait du laser m’avait dit : “si vous voyez des mouches qui passent devant voutre oeil, c’est mauvais signe”. Bon, depuis deux jours, les mouches n’arrêtent pas de passer. Peut-être c’est ma rétine qui est en train de craquer. Aille ! faut que je me renseigne pour savoir ce que je fais très exactement si tout à coup ça se déchire.

Voilà ce que je vois sur mon écranmouches.jpg

Oscar le petit chat

The New England Journal of Medicine raconte le rôle touchant d’Oscar, un petit chat de l’unité pour malades d’Alzheimer à Rhode Island aux États-Unis. Oscar présente la particularité d’identifier les patients dont la mort est imminente et de se blottir contre eux pour leur apporter un ultime réconfort. Il s’intéresse à chaque patient, mais ne s’installe sur leur lit que lorsque le moment fatal est arrivé. Oscar transforme les pratiques de fin de vie, en prévoyant les décès, en permettant d’organiser l’appel aux familles et les derniers offices religieux et en se blotissant contre ceux qui, sans lui, s’en iraient dans la solitude… Bravo Oscar !

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Lui  c’est Maxime, le petit chat de Laurent et Mamak, qui est venu passer des mois entiers auprès de maman pour la distraire un peu de sa maladie d’Alzheimer. On ne t’oublie pas maxime ! Merci d’avoir tenu compagnie à Maman !

J’ai tellement sommeil !

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Quand les hirondelles veulent dormir, elles montent à deux mille mètres et se laissent descendre lentement en planant sur les ailes du ciel… J’aimerais être une hirondelle : monter très haut à la verticale de ma tête et me laisser porter sur l’air frais en planant pendant deux mille ans…

© Hirondelles andalouses. Bernnard Plossu.

Des nuits de 14h24…
Des ailes pour planer au-dessus de la vie

Avec des éléphants…

Je ne sais pas pourquoi tout à coup – peut-être parce que Julia doit venir en avion d’Italie ce week end – je me suis souvenu que pendant la seconde guerre punique (en 218 av.JC), Hannibal avait franchi les Alpes avec son armée et ses éléphants. Qu’il ait passé les Alpes avec des éléphants me renverse carrément ! Je ne comprends pas comment il a fait. Chapeau en tout cas.

“Suspension d’activité par suite d’ennui mortel de l’intéressé”

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Dans une lettre à Kawabata (datée du 17 octobre 1953) Mishima écrit :

“Quant à moi, j’en ai par dessus la tête de Shufu no tomo [un roman qu’il faisait paraitre en feuilleton dans une revue féminine] (…)

du coup je songe à faire publier par l’éditeur une annonce qui dirait :
“Suspension du feuilleton par suite d’ennui mortel de l’auteur”

J’en ai tellement marre des gens que je vois merder à mon bureau que je crois bien que je vais faire comme Kawabata : écrire à mon Directeur et lui demander une “suspension de mon activité par suite d’ennui mortel de l’intéressé”.

Ils partent et ils reviennent

Quand ils sont partis en vacances, ils étaient fatigués et ils se plaignaient.
Quand ils reviennent de vacances, ils sont fatigués et ils se plaignent encore : de tout, du temps qu’il faisait, de la fatigue, de se retrouver à Paris etc etc.
Moi qui, depuis des années, n’ai pas pris un jour de vacances à cause d’Alzheimer, ce qui me tue ce sont les gens qui partent en vacances et qui se plaignent à leur retour. ça me dépasse et ça m’ennerve.

Je vais apprendre le braille

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Les derniers examens montrent que mon champ de vision continue de se rétrécir dangereusement. Il faut désormais que je fasse sérieusement gaffe au bus qui arrive sur la droite ou la gauche car, boum, je ne le vois le bus que lorsque c’est trop tard. En bas non plus, je ne vois plus rien et je me tape tous les trottoirs. Il y a plein de trucs que je ne vois plus. Et si j’ajoute tous ceux que je ne veux pas voir. Et aussi ce que je ne veux pas entendre, ça fait pas mal de choses qui sont désormais exclues de ma vie. Reste juste ce qu’il y a devant et en haut. C’est déjà pas mal. Surtout en haut : les oiseaux, le ciel, la lune, les étoiles… c’est beau !

Pouvoir décrire la lumière… si un jour elle disparaissait ?
Imaginer ce qu’imaginent les aveugles…
Et si on écoutait enfin les sourds-muets ?
Je propose une “journée nationale” pour les chiens d’aveugles

180 Paters à l’heure !

Je suis en train de lire le Journal de Raymond Queneau (1939-1940) et tombe sur cette entrée du 28 février 1940 :

“Avant d’aller chez Mme Souparis, je suis allé à St Jean et j’ai récité dix Paters, cinq en latin et cinq en français ; et réfléchi aussi un peu sur la répétition dans le sacré. (Il faut 20 secondes pour réciter un Pater sans se presser ; 3 par minutes ; 180 à l’heure” (…)

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Dire qu’on fait du 180 à l’heure avec ses Paters, je trouve cela superbe :-)

Vertige

Mon doigt a glissé et, complètement par hasard, j’ai tapé la lettre “h” dans le champ de recherche de Google. Et paf, Google me bascule la constante de Planck… Vertige de ne pas comprendre. J’enrage : je n’ai pas fait les bonnes études.

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Faire son travail d’étoile…

Pendant que je suis dans la lecture de Claude Roy, encore cette petite phrase incandescente tirée d’un poème “en modeste hommage à Schönberg” :

Les étoiles sans rien dire font leur travail d’étoiles

Claude Roy, “La nuit transfigurée”

Les mails, les lettres et la la silhouette du facteur

Je tombe sur ce petit paragraphe d’une lettre de Maiakovski :

“Maintes fois, je m’avancerai jusqu’à la barrière et là, triste, protégeant d’une main décharnée mes yeux des rayons obliques du levant, je fixerai l’horizon, guettant, parmi les nuages de poussières, l’approche de la silhouette familière du facteur”.
Valdimir Maiakovski.
Lettres à Lili Brik,
Moscou, mi-décembre 1917

Quand je pense à la façon dont mes emails m’arrivent toute la journée, j’ai un peu honte pour la technologie.
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Quand on marche le soir à la lisière du temps…

En me promenant tout à l’heure, les trois premières lignes d’un poème de Claude Roy se sont déroulées dans ma tête. J’aime beaucoup Claude Roy et je me rends compte que je me promène de plus en plus… à la lisière du temps…

“Quand on marche le soir à la lisière du temps
il monte soudain une bouffée d’enfance
les cris des hirondelles folles d’un préau d’école
ou le silence de la barque sur la rivière
à la tombée du jour quand le soleil rase l’eau qui moucheronne
ou bien la sonnette (deux fois) de l’épicerie-mercerie
où on achète après l’école les rouleaux de réglisse Zan
qui barbouille de noir et font les doigts collants

On tend l’oreille le long du voile de la brume
Quelqu’un parle à voix basse
sans qu’on puisse reconnaître sa voix
et sans comprendre les paroles
les mots chuchotés loin à l’envers du silence

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Claude Roy, A la lisière du temps
Hôpital de la Pitié
25 août 1983

— Quelques textes de Claude Roy :
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Des vacances en mi bémol

Muriel est en Hongrie, Julia en Italie, Robert et Jocelyne reviennent d’Ecosse et repartent dans le sud, Lydie, pour moi, sera toujours à Sils Maria même lorsqu’elle part en Isaraël, Jonathan part aux USA et moi je reste en Alzheimer. Comme depuis plusieurs années, je vais donc passer mes vacances dans la région de do mineur ou mi bémol… Ce sont désmormais mes seules destinations mentales et spirituelles. Je ne bouge plus guère que dans ma tête. Heureusement j’ai un iPod avec tout ce qu’il faut pour voyager :-)

Planter des rudbeckias jaunes

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J’ai fait un rêve curieux cette nuit. Je rêvais que j’étais jardinier. Je creusais une terre qui était assez tendre et douce en me demandant si j’allais planter des pivoines roses ou des rudbeckias jaunes. Mais, soudain, je me suis rendu compte que le trou prenait la forme d’une tombe… Je me suis arrêté net et je me suis réveillé.
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Quelques rêves
«Sturzkampfflugzeug»
La clé sous le paillasson !
Clac clac je vais te couper la tête !
Transformation imminente en dindon ?
Rêve chinois N°2
Hôtel Matignon, chambres à la journée…
Parfois rêver c’est dur…

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La tête qui pivote

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Expérience très bizarre récemment avec mon iPod. J’écoutais la cantate de Bach “Wie Schön Leuchtet Der Morgenstern” et je m’étais trompé d’oreillette. J’avais mis celle de droite dans l’oreille gauche et celle de gauche dans l’oreille droite. … Et tout à coup panique, l’église avait pivoté dans ma tête, je n’étais plus assis face au choeur mais face au narthex…. Bon, vous me direz que ce n’est peut-être pas grave que les haubois soient à gauche ou à droite, mais panique musicale et architecturale tout de même. J’aime pas les torticolis musicaux.

J’aime bien tomber à la renverse :-)

Bon, ce n’est totalement pas le genre de musique que j’écoute le plus souvent mais je viens de tomber, sur la chaîne Mezzo, sur Ben Heppner (tenor canadien) chantant le Cid de Massenet (”ö firmament, azur, lumière…”) et je suis tombé à la renverse. Tomber à la renverse fait du bien parfois :-)

L’infini…

J’aime beaucoup cette phrase :

« Qui est là ?
Ah très bien : faites entrer l’infini.”

Aragon

maman j’ai peur !

Quand j’étais petit et qu’il y avait des orages, je rigolais quand ma grand-mère débranchait le fer à repasser, la radio et toutes les lampes de la maison pour éviter la foudre qui devait – forcément – choisir notre maison, entrer par le fenêtre et arriver pile poil dans le salon où on lisait des albums du Père Castor… Et aujourd’hui c’est Orange qui m’envoie des mails pour me dire de débrancher ma Livebox quand il y a de l’orage. C’est donc ma grand-mère qui avait raison :-)

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[orange/orage].

Le poids de ce qu’on porte

Alzheimer est une maladie terriblement dure à porter. Mais à l’époque j’avais vu sur KTO une mère qui allait à Lourdes avec ses trois enfants tétraplégiques ! Elle était radieuse et ça m’a donné un peu honte de me plaindre de ce que je portais. Donc je continue à porter en essayant – bien que ce soit de jour en jour un peu plus impossible à porter – de me plaindre le moins possible puisqu’il y en a d’autres qui portent encore plus lourd et qui arrivent à rester radieux !

L’Occident est malade dans sa tête

Sur Radio Notre dame, ils parlaient des églises qui se vendent en hollande ou en angleterre parce que la chrétienté s’effondre et qu’il n’y a plus d’argent pour les entetenir ! En Hollande ils les transforment en supermarchés et ils parlaient même d’une église, en France, qui avait été transformée en champ de tir ! Il fallait vraiment oser. – Plus ça va et plus je suis pour le retour de la marine à voile, de la monarchie à cheval et de la viellle chrétienté du moyen-âge. Marre des supermarchés et des caisses enregistreuses.

Laisser les mots tranquilles !

C’est drôle, en passant devant le théâtre de l’Odéon, je me suis rappelé qu’il s’était appelé successivement Théâtre de la Nation (1789), Théâtre de l’Egalité (1794), Odéon (1796), Théâtre de France (1959), Théâtre de l’Europe (1990)…….. Qu’ils arrêtent ! C’est comme “Freude” qui devient honteusement “Freiheit” dans la Neuvième symphonie de Beethoven revisitée pour faire un hymne européen en 1985. Mais qu’ils arrêtent de toucher aux choses et aux mots ! Qu’ils laissent les mots tranquilles ! Et surtout qu’ils nous laissent tranquilles avec leur idéologie pesante (nation, égalité, europe…)
— J’ai d’ailleurs pu constater récemment qu’il en allait de même avec le Panthéon : avant 1791 c’était l’église Sainte-Geneviève. En 1791 ils le transforment en Panthéon. Et puis en 1806 ils transforment à nouveau le Panthéon en culte catholique. Et en 1830 ils remettent ça et le transforment à nouveau en panthéon national. Puis il redevient l’église Sainte-Geneviève. Et en 1848 ça recommence : ils le transforment à nouveau en Panthéon. Et en 1851, rebelotte : on rend le Panthéon au culte catholique…. Bon j’arête de noter car l’idéologie de ces abrutis me rend dingue. Si seulement ils pouvaient arrêter cinq minutes.

“Le Programme en quelques siècles”…

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“On supprimera la Foi
Au nom de la Lumière,
Puis on supprimera la lumière.

On supprimera l’Âme
Au nom de la Raison,
Puis on supprimera la raison.

On supprimera la Charité
Au nom de la Justice
Puis on supprimera la justice.

On supprimera l’Amour
Au nom de la Fraternité,
Puis on supprimera la fraternité.

On supprimera l’Esprit de Vérité
Au nom de l’Esprit critique,
Puis on supprimera l’esprit critique.

On supprimera le Sens du Mot
Au nom du sens des mots,
Puis on supprimera le sens des mots

On supprimera le Sublime
Au nom de l’Art,
Puis on supprimera l’art.

On supprimera les Écrits
Au nom des Commentaires,
Puis on supprimera les commentaires.

On supprimera le Saint
Au nom du Génie,
Puis on supprimera le génie.

On supprimera le Prophète
Au nom du Poète,
Puis on supprimera le poète.

On supprimera l’Esprit,
Au nom de la Matière,
Puis on supprimera la matière.

Au nom de rien on supprimera l’homme ;
On supprimera le nom de l’homme ;
Il n’y aura plus de nom ;
Nous y sommes”.

Armand Robin, Le programme en quelques siècles, © Gallimard